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bordent la route, tout est frappé de sénilité foudroyante. Il y a des femmes qui passent ainsi, sans transition, d’un âge à l’autre.

On se lève de bon matin lorsqu’on a mal dormi : cela coûte moins, ce me semble. Mais aussitôt hors du lit, on frissonne. L’humidité est entrée dans la maison par les volets fermés et les fenêtres bien jointes : il faudra compter avec elle, jusqu’aux froids. La température est encore tiède, car ce vent furieux nous arrive du sud-ouest. Le thermomètre accuse une quinzaine de degrés. Que cette température eût été bienvenue il y a seulement, trois semaines ! Maintenant, il n’y a pas à dire, on a froid dans la moelle des os.

Cependant, j’aurais honte de faire allumer du feu dans les poëles : on assure d’ailleurs qu’à se chauffer trop tôt l’homme devient frileux pour tout l’hiver. Mais nous avons une cheminée, une seule dans la maison : si j’y faisais jeter une bourrée de bois sec ! Il est bien établi qu’un feu de cheminée n’a jamais chauffé une chambre ; mais pour sécher le tapis, la tenture et le propriétaire, je ne connais rien de tel. Séchons la moelle de nos os. Le fagot est délivré de sa hart, l’allumette est mise ; le feu flambe et petille. À la bonne heure, on se sent déjà mieux.

Par quel caprice de la mémoire ce feu me rappelle-t-il la première poignée de charbon de terre