Page:About - Causeries, deuxième série.djvu/293

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nos cellules, les petites bêtes qui piquent y pullulent insolemment.

Malgré toutes ces horreurs, on est heureux ici, et je n’hésite pas à vous recommander l’auberge de Sainte-Odile. Si l’on n’y trouve pas le même confort qu’au Grand-Hôtel, si les lits sont trop durs, les corridors trop sonores, si l’on mange sur la toile cirée sans autre nappe, si le maigre est obligatoire deux fois par semaine, si la règle un peu bebête interdit le cigare, le piano et jusqu’aux simples chansons, tous ces défauts sont rachetés par des avantages inestimables. L’auberge, telle quelle, est située au milieu des plus belles beautés des Vosges. Elle touche aux grands bois et aux châteaux héroïques ; elle regarde la forêt Noire face à face par-dessus la plaine d’Alsace et le large ruban du Rhin.

Nous faisons chaque jour deux grandes promenades, la première jusqu’à midi, la seconde jusqu’au coucher du soleil ; on escalade des montagnes, on se laisse rouler dans les ravins, on se froisse, on se heurte, on se fatigue, on sue à tordre sa chemise, et l’on ne se fait pas de mal. Cette gymnastique virile obtiendrait, j’en suis sûr, l’estime d’Hector Malot, notre vaillant collaborateur, et de M. Eugène Paz qui veut régénérer les Parisiens par l’exercice. On s’étonne parfois que Gustave Doré, le plus puissant artiste et le plus fécond de notre