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ments se plaignait d’être vexé sans raison par les bureaux de tous étages, un bon décret vint à son aide. « Braves gens, nous dit-on, vous avez assez couru de Caïphe à Pilate, du préfet au ministre. Soyez heureux ! À dater de ce jour, les préfets sont investis d’un pouvoir absolu. »

Je vois bien ce que les préfets ont gagné à cette réforme ; mais le bénéfice des administrés me semble beaucoup moins net. Supposez que demain une loi, rédigée dans le même esprit, élargisse et fortifie l’autorité des maires : les maires y gagneront ; mais nous ? Notre maire n’est pas nous ; il ne représente pas la commune ; au contraire ! Tant qu’il n’est pas élu par ses concitoyens, il représente le préfet dans la commune, comme le préfet représente le ministre de l’intérieur au chef-lieu, comme le ministre représente l’Empereur à l’hôtel Beauveau. C’est le gouvernement en cascade, conforme sur tous les points, sauf un, à la logique du droit divin.

En droit divin, Dieu choisirait le roi, qui choisirait le ministre, qui choisirait le préfet, qui choisirait le maire, qui choisirait les conseils municipaux, qui bâcleraient à leur fantaisie les affaires des citoyens.

Mais nous n’en sommes plus là : le peuple a renversé la pyramide. Si notre France est à nous, si le plus haut personnage de l’empire n’est qu’une au-