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n’est pas à conquérir, mais votre désintéressement et votre générosité sont encore à montrer, si j’en crois vos adversaires. Montrez-les, et montrez-les vite, au nom du ciel !

Si la grève dure et si elle gagne du terrain, comme tout l’annonce, personne ne peut dire ce qui adviendra de nous.

Le commerce français, grâce aux nouveaux traités, importe en ce moment cinquante mille chapeaux anglais. Il importera dans un mois des voitures anglaises et tous les produits anglais qui ne se fabriqueront plus chez nous. La Suisse, la Belgique, l’Allemagne, n’attendent qu’une bonne grève bien établie pour nous inonder de leurs produits. Le mal sera passager, j’y compte bien ; la France ne sera pas longtemps un débouché, comme l’Inde anglaise et la côte de Guinée. Mais si l’importation ne nous menace pas sérieusement, notre exportation est sérieusement menacée. J’entends déjà les brillants étrangers du boulevard qui disent entre deux bouffées de cigare :

« Eh ! ça nous est bien égal, donc déjà ! Si la France ne veut plus nous servir, ou si elle nous prend trop cher, nous ferons nos commandes à Londres ou à Bruxelles ! »

Messieurs les patrons, consultez-vous ; voyez s’il vous en coûtera plus d’élever le taux des salaires ou de perdre les bénéfices de l’exportation.