Page:About - Causeries, deuxième série.djvu/137

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

point de vue. Vos affaires sont vôtres et non miennes. Je ne suis ni ouvrier ni patron ; il y a plus : je ne connais ni un patron ni un ouvrier de Paris, car il y-a sept ans que j’habite la province.

Aucun intérêt proche ou lointain ne me pousse à prendre part à la guerre. Si nous étions au temps du suffrage restreint, j’aurais peut-être un intérêt politique à défendre vos patrons contre vous. Sous le régime du suffrage universel, j’ai tout à gagner à vous défendre contre eux, car vous êtes le grand nombre, et vous tenez entre vos mains des récompenses dignes d’envie. Mais je n’ai nulle ambition, je n’aspire pas à siéger sur les bancs du Corps législatif, et cela pour une raison bien simple, c’est que je suis à peu près sûr de n’avoir aucun talent oratoire. La politique active ne me séduit pas du tout : elle prend trop de temps, elle exige des sacrifices au-dessus de mes forces, notamment celui de la paix et de la solitude, où je travaille selon mes goûts. La tribune du journal me suffit pour les petites vérités que j’ai à dire. Ainsi donc vous avez raison : si je ne consultais que mon avantage personnel, je vous laisserais guerroyer avec vos patrons, et je me tiendrais tranquille.

Mais on est citoyen, on est homme, et l’on ne pense pas seulement à soi. Si l’on se laissait entraîner aux petites passions personnelles, on relè-