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ALSACE.

dépenses, et la glacière qui décidément refuse de conserver la glace, et cette fameuse pisciculture, où j’ai fini par récolter quatorze truites après en avoir semé vingt mille. Ah ! la belle journée ! comme elle passait vite ! Quel chemin je faisais, sans m’en apercevoir, à force de tourner sur moi-même, et de quel sommeil à huit heures je m’endormais devant mon assiette !

Le lendemain, quelque temps qu’il fit, je m’en allais à la petite ville, reprendre possession de mes amis. Et, comme j’en avais passablement, cette autre fête du retour prenait encore une journée. Je ne rentrais qu’à la cloche du dîner, et jamais seul, Dieu merci !

Celte fois, j’en ai été quitte à bon marché : j’ai fait deux visites. La première à un ménage sans enfants qui n’est pas encore parti, parce qu’il ne sait où aller ; on hésite entre le midi de la France et le sol hospitalier de la Suisse. Ce n’est pas une petite affaire que de se transplanter soi-même lorsqu’on n’a plus vingt ans, loin du pays que l’on connaît, où l’on est connu, pour essayer d’un autre climat et aborder de nouveaux visages. Il y a dans cette aventure un incertain que le cœur le plus résolu n’affronte pas sans angoisses.

À ma deuxième visite, je trouvai une femme de soixante ans passés, assise au milieu de ses malles et pleurant à chaudes larmes. On pleure beaucoup