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LA RÉSISTANCE.

« L’expérience n’est pas engageante. Le commerce allemand sait que nous ne voulons pas entrer dans ses boutiques ; l’industrie allemande sait que nous ne voulons pas consommer ses produits : donc les industriels et les marchands attendront pour se fixer chez nous qu’ils y aient une clientèle de bourgeois, d’artisans et surtout de cultivateurs allemands, l’Alsace étant avant tout un pays agricole. Les cultivateurs viendront-ils ? cela n’est pas impossible à la longue, mais ils peuvent compter qu’on leur tiendra la dragée haute, et qu’ils n’achèteront pas nos bonnes terres à cent sous l’acre comme chez Brigham Young au bord du Lac Salé. L’Alsace ne sera donc pas colonisée aussi vite que les Parisiens ont l’air de le craindre, quand même nous émigrerions par milliers.

« Songez enfin que très-probablement on ne nous laissera pas le choix, et que les pères de famille, pour peu qu’ils aient un fils, ne seront pas les maîtres de demeurer ou d’émigrer. Rappelez-vous l’histoire de Francfort en 1867. Les Prussiens sont habiles dans l’art des annexions ; ils y raffinent. Pour contraindre les fils à servir sous leurs drapeaux, ils ont imaginé la responsabilité des pères. Chez nous, le réfractaire est durement puni, mais il est puni seul ; la loi le traite en homme et juge avec raison que nul autre que lui n’est responsable de ses actes. Sous le régime des annexions