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HUIT JOURS D’ÉTUDE.

ficiels qu’on s’est donné la peine de leur offrir ; mais le grand jour de 1789 a lui pour eux, ils connaissent la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ; ils en ont pris acte, et, sous aucun prétexte, ils ne voudraient rétrograder jusqu’à l’ancien régime. Comment se laisseraient-ils soumettre au despotisme militaire et féodal d’un État qui retarde d’un bon siècle sur nous ? Un soldat allemand disait à une servante alsacienne : « Il me tarde de rentrer dans mon pays, car le métier qu’on nous fait faire ici est le plus misérable du monde. Je veux bien être détesté, car nous avons un proverbe qui dit : Grande haine, grand honneur. Mais le pire est qu’on nous méprise, nous les vainqueurs et les conquérants : les mendiants déguenillés détournent la tête sur notre passage, les chiens eux-mêmes ne nous regardent pas. »

La brave fille lui répondit : « Et qui donc pourrait estimer des hommes qui se laissent battre par leurs sous-officiers sur la place du Château comme des bœufs ou des ânes ? Vous avez vaincu nos garçons dans cette malheureuse guerre, parce que vous étiez plus nombreux, mieux armés et mieux commandés ; mais nos garçons valent mieux que vous, car si un caporal les touchait seulement au visage, ils lui auraient bientôt planté la baïonnette dans le ventre ! »