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HUIT JOURS D’ÉTUDE.

plaire ; le fonctionnaire qui paye son terme et qui se met en frais de politesse a presque le droit de compter que son propriétaire ne le traitera point en ennemi. Ces accommodements, s’il en transpirait quelque chose, ne trouveraient pas grâce devant l’opinion publique. Chacun a l’œil sur ses voisins, le patriotisme est ombrageux dans la bourgeoisie, farouche dans le peuple. La police des bons citoyens n’a peut-être pas eu le pouvoir d’empêcher quelques faiblesses, mais elle les a contraintes de se cacher ; elle en a étouffé le scandale et arrêté la contagion. Si l’ennemi se rend justice, il conviendra qu’ici du moins il a plus irrité qu’amorti les sentiments français en treize mois d’occupation, et plus perdu au total que gagné.

Les grands politiques de Berlin, qui ne font rien à la légère, avaient sans doute leurs raisons pour éterniser jusqu’à ce jour le cantonnement des troupes en laissant sans emploi les casernes petites et grandes, ou même impériales, qu’ils ont sous la main. Ils espéraient que leurs soldats, entassés pêle-mêle avec les habitants dans des logis étroits, se fondraient petit à petit dans la masse et feraient corps ; que le rapprochement forcé engendrerait des sympathies ; que la communauté d’origine, de langue, de mœurs, de goûts, prévaudrait à la longue sur l’esprit na-