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ÉPILOGUE.

cette grande émigration, qui, après avoir emporté la colonie des fonctionnaires français, entraîne tous les catholiques assez riches pour s’expatrier. La plupart des Alsaciens qui demeurent, pouvant partir, appartiennent à la confession d’Augsbourg. Ce n’est pas que les protestants n’aient donné les plus beaux exemples de patriotisme ; j’en sais beaucoup qui ont été admirables, et, pour ne citer qu’un seul fait entre mille, je rappellerai le soufflet de madame Eschenauer.

Elle passait dans la rue, en grand deuil, le jour anniversaire de Reichshofen ; un officier allemand la rencontre et lui dit :

— Toi aussi, belle dame, tu portes le deuil de la France ?

Elle répondit du revers de la main, si bruyamment, que le général-commandant supérieur dut l’entendre, car le faquin fut renvoyé dans son pays. Madame Eschenauer est la femme d’un pasteur, et beaucoup d’autres protestantes, soufflet à part, se sont montrées bonnes Françaises comme elle. Mais on peut dire, en thèse générale, que le joug allemand est un peu moins intolérable aux protestants qu’aux catholiques. Si tous les Alsaciens aiment la France d’un même cœur, ils ne peuvent pas tous détester également la Prusse : il n’y a pas de haine inexpiable entre ceux qui prient en commun.