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ÉPILOGUE.

dénotent un pur Alsacien, et sa loyale bonhomie ne dément pas les signes extérieurs. Il a fait ses études à Strasbourg, sous la direction du célèbre abbé Bautain, et reçu le sacrement de l’ordre côte à côte avec le père Gratry, qui était son voisin par ordre alphabétique. Je ne crois pas qu’il ait jamais bougé du diocèse, car il compte environ trente ans de service dans les prisons ; mais il a l’esprit large, ouvert et tolérant comme s’il avait fait deux fois le tour du monde. La vie n’a guère de secrets pour celui qui a touché du doigt tous les crimes et toutes les douleurs. Ce bon et beau vieillard a conduit à l’échafaud onze condamnés, dont deux femmes ; aussi peut-il me dire avec un sourire doux et voilé :

— Je suis un peu chez moi dans votre chambre.

Il m’a conquis de prime abord, et, le voyant instruit de toutes choses, j’ai profité de ses visites pour m’éclairer sur la persécution des catholiques en Alsace. Les détails qu’il m’a donnés sur l’expulsion des jésuites font le plus grand honneur aux victimes et à leurs amis. À l’heure de l’exécution, une multitude d’hommes, de femmes et d’enfants en prières remplissaient la chapelle. L’agent des hautes œuvres prussiennes fut un instant troublé par ce spectacle et offrit d’ajourner la partie à une meilleure occasion. Ce fut le père directeur qui congédia l’assemblée, prê-