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ALSACE.

ments que j’ai vus ne sont ni assez grands ni suffisamment ventilés pour des chambrées de trente hommes. La nourriture arrive toute préparée de la maison de correction : elle se compose de pain noir et de trois soupes par jour. De temps à autre, on ajoute à la ration 40 grammes de viande hachée menu ; si peu, que l’analyse chimique en trouverait à peine une trace. Les détenus travaillent presque tous ; les uns s’occupent à dépecer de vieux câbles goudronnés, dont l’étoupe est mise au pilon dans une papeterie ; les autres font des brosses, des souliers pour la troupe ; d’autres passent leur temps à trier du café pour un épicier de la ville.

Sur ces travaux adjugés au rabais, l’État prélève 60 pour cent ; et sur le maigre pécule qui reste, les détenus n’ont pas même le droit d’acheter des aliments un peu mangeables. Le seul extra qu’on leur permette est un litre de bière ou un demi-litre de vin, le samedi soir. C’est un régime bien sévère pour des malheureux dont plusieurs sont aussi innocents que je l’étais moi-même. J’ai vu passer un jour certaine soupe à la farine dont l’odeur me poursuivra toute ma vie. Et parmi ceux que la prison met dans l’alternative ou de souffrir la faim, ou d’avaler ce brouet nauséabond, il se trouve pourtant des hommes qui n’ont ni tué, ni volé, ni même mendié. La prison