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ALSACE.

j’eus, le soir même, et en abondance, tout ce que je pouvais désirer, linge, papier, brosses, savon, et même des cigares. Ils s’occupèrent de ma nourriture, et, dès le premier moment de cette captivité jusqu’à la dernière heure, il n’a tenu qu’à mol de faire deux excellents repas par jour. On me promit, en outre, que, le surlendemain, lundi, le juge d’instruction laisserait ma famille et mes amis me visiter tout à leur aise, et l’espérance que j’en conçus ne fut aucunement trompée.

Au moment où j’allais monter à la pistole, le gendarme prussien qui m’avait amené vint prendre congé et me dit :

— Monsieur, je retourne à Saverne, et j’espère que vous y serez bientôt, vous aussi.

Il y a donc de braves gens partout, même en Prusse !

Quand la seconde grille, qui sépare la prison de la cour d’entrée, se fut ouverte devant moi, le premier objet qui frappa mes regards fut un portrait du roi de Prusse, enluminé comme une vieille image d’Épinal, et plus semblable à un Gambrinus de brasserie qu’à un prince de notre époque. La dévotion de quelque employé l’avait enguirlandé de fleurs de papier peint et déteint, et, par un hasard maladroit, cette glorieuse effigie était suspendue au-dessus d’un trou noir qui est le parloir des prévenus. Les parents, s’il en est, qui viennent