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PHALSBOURG.

cher monsieur, que les Français travaillent ? Aurons-nous bientôt un canon qui démonte leur fameux Krupp ? »

À ces mille questions qui respirent le patriotisme le plus ardent, je réponds de mon mieux, assez mal. On parle d’autre chose, on discute l’événement du jour, la rentrée de M. Cerfbeer dans son château et les fêles par lesquelles il a célébré la délivrance. M. Cerfbeer est bien connu à Lutzelbourg ; avant de déserter, il y déjeunait quelquefois sous le drapeau parlementaire : « Ah ! monsieur, me dit-on, comment cet homme n’a-t-il pas fait un ou deux ans de prison pour l’exemple ? Si celui-là reste impuni, pourra-t-on maintenir les hommes dans le devoir ? Sa grâce nous a fait hurler ; savez-vous quel effet elle a produit sur nos soldats ? »

Nos soldats ! nos soldats ! C’est le commencement et la fin de tous leurs discours. On ne pense qu’a nos soldats dans ces pays que l’Allemand croit tenir sous sa lourde patte.

J’ai regagné Saverne en suivant les bords du canal ; c’est une promenade de deux à trois heures, dans un paysage admirable. Les montagnes boisées qui descendent en pente douce encaissent les deux rives ; on rencontre à chaque pas un filet d’eau glissant sur la mousse, ou une nappe de bruyères en fleurs.