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ALSACE.

qui n’est pas à l’avantage des Allemands. Ils se sont retournés presque instantanément contre leurs nouveaux maîtres ; ils s’apprêtent à prouver que la ville leur appartient, qu’ils sont chez eux, et le Prussien se trompe s’il croit qu’il en aura facilement raison.

Tout n’est pas roses dans le métier de conquérant, et nos vainqueurs ont chaque jour une nouvelle occasion de rentrer en eux-mêmes. S’ils ne rencontrent qu’antipathie, résistance sourde ou déclarée dans les groupes qu’ils avaient lieu de croire hostiles à la domination française, que sera-ce dans les centres où tout est franchement, naïvement, cordialement français ?

Arrêtons-nous à Schlestadt, par exemple. Là, les Badois du général von Werder n’ont pas surexcité le patriotisme comme à Strasbourg par les horreurs d’un long bombardement. La place n’était pas en état de défense ; il a suffi de brûler un quartier pour décider la petite garnison à se rendre. Le vainqueur a dû se dire en entrant : Voilà une population de dix mille âmes que nous avons achetée à bon compte.

Mais savez-vous combien il leur en reste aujourd’hui, de ces dix ou onze mille âmes ? Quatre mille, et qui ont opté, sans ignorer d’ailleurs que cet acte de patriotisme n’était qu’une protestation inutile. Six ou sept mille habitants ont émigré ;