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COLMAR.

poursuivi ceux qui les avaient perdues, le premier bourgeois de Colmar qui se laissa poursuivre et saisir plutôt que de payer deux fois, fut violemment exproprié de sa pendule ! Les Allemands ont beau se mettre en garde contre leur premier mouvement ; l’horlogerie les attire malgré eux par une action magnétique.

Les taquineries à la mode vénitienne sont en honneur à Colmar comme dans toute l’Alsace ; ces procédés, qui constituent la petite résistance, se renouvellent chaque jour. On évite la musique militaire comme un fléau ; non-seulement on évalue les brasseries dès que l’orchestre prussien s’y produit, et l’on fait des détours énormes pour éviter les places publiques où il s’installe, mais lorsqu’un colonel se fait donner un concert dans sa cour, tous les volets se ferment avec fracas, et la maison devient aveugle et sourde. Une femme du peuple qui s’était fourvoyée à proximité d’un orchestre militaire en plein vent, s’approche des musiciens dans l’intervalle de deux morceaux, et leur dit : — pauvres gens ! vous avez un double travail ; il faut que vous fassiez cette musique et encore que vous l’écoutiez vous-mêmes !

Dans les premiers temps de l’invasion, lorsqu’un officier se promenait en traînant son sabre sur le pavé, un gamin le suivait en murmurant :

— Monsieur ! pour deux sous ! pour deux sous !