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ALSACE.

de braves gens, rasés, frisés, poudrés, habillés de velours, de taffetas ou de satin, agrémentés de broderies et de dentelles : c’est la galerie des ancêtres. À la richesse de l’habit on les prendrait pour des gens de cour, si l’éclat du teint, la redondance de la chair, la vigueur de l’ossature, un air de gaillardise et de bonhomie ne trahissaient le sang bourgeois. Mais ce sont des bourgeois de distinction, la fine fleur de la classe moyenne : ils ont été magistrats, avocats, échevins, stettmeister ou bourgmestres.

Leurs visages placides et souriants nous annoncent que nous sommes chez eux, et que nous y sommes les bienvenus. On croit les entendre parler et dire avec ce brave accent qui ne perd jamais ses droits : « Prenez donc place… Donnez-vous la peine… Il faut revenir aux perdreaux, puisque vous les trouvez bons… Encore un verre de Ribeauvillé ! » Ces braves gens ont vécu ici, nous mangeons le potage dans les cuillers qu’ils ont usées, nous buvons dans leurs verres ; tous les meubles qui nous environnent leur ont servi : ils ont miré leurs honnêtes figures dans ces glaces d’un éclat verdâtre, ils ont consulté ce grand baromètre de bois doré ; cette horloge de marqueterie leur a carillonné les heures. La digne madame Bartholdi, qui vit seule au milieu d’eux pendant une partie de l’année, nous raconte quelle ne s’ennuie jamais