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ALSACE.

tant, escarpé, rocailleux, mais toujours pittoresque, qui tantôt rampe sur les flancs des hautes collines, tantôt descend en pente rapide dans les vallées, et s’enfonce parfois sous des voûtes de sapins où il doit faire nuit en plein jour, La variété des spectacles, les petits incidents de la route, la fuite effarée d’un chevreuil, l’apparition de quelque prairie basse où les brouillards accumulés semblaient former un lac, la découverte successive de deux ou trois sommets dentelés comme des ruines, et qu’on prenait toujours pour Sainte-Odile ; enfin par-dessus tout la jeunesse de mes compagnons et notre gaieté naturelle nous préservaient de la fatigue. Quelques groupes de promeneurs redescendaient la montagne au galop, tandis que nous la gravissions au pas. Les premiers nous souhaitaient le bonsoir, sans réflexion ; les suivants laissèrent voir un peu d’étonnement ; les derniers, si toutefois j’ai bien entendu leur langage, s’éloignaient en disant : « Ces gens sont fous de courir les forêts à pareille heure avec un enfant sur les bras. »

Ce jugement, saisi au vol, me fit faire un retour sur moi-même. Je tirai ma montre : il était plus de sept heures. Je hélai le guide, qui courait à plus de cent pas en avant, comme si notre malle eût été du tissu dont la nature fait les ailes.