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COLMAR.

longues marches, aux ascensions, aux promenades aventureuses, et ce régime leur réussit fort bien, car on voit des vieillards qui le suivent encore à soixante-dix ans sonnés. Une famille entière se met en route pour la cascade du Nideck, ou pour le Champ du Feu, comme vous prenez une loge à l’Opéra. Cela coûte moins cher, et l’on revient plus content ; peut-être avec un peu de lassitude dans les jambes et quelques ampoules aux pieds, mais l’esprit soulagé, les poumons dilatés, le sang rougi. La misérable hospitalité des montagnes a des charmes piquants, d’âpres délices que l’on ne soupçonne pas à la ville. Une croûte cassée au bord de quelque source, un gros plat de châtaignes fumantes, partagé avec des charbonniers, une nuit de sommeil sur des copeaux, dans une scierie qui tremble au cours du torrent, une tasse de lait échangée contre une poignée de tabac, voilà des plaisirs simples et vulgaires s’il en fut jamais. J’en ai connu de plus raffinés, je n’en connais pas de plus vrais, de plus nets, ni dont l’arrière-goût reste aussi franc dans la mémoire, Marcher, gravir, rouler sur des pentes rapides, avoir chaud et trouver un ombrage, être las et s’étendre, avoir soif et boire à longs traits, humer l’air vif à pleine bouche, ouvrir des yeux tout ronds devant un beau paysage, aspirer l’odeur acre des chênes, écouter le vent qui chuchote dans les bran-