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COLMAR.

trouvait un intérêt de haute gourmandise à ne point s’éloigner de sa mère.

Au moment de lever le fouet, j’eus l’idée d’emmener Camille. Camille était un orphelin que les destins amis nous avaient envoyé et qui passait ses vacances chez nous ; un charmant enfant de seize ans, blond, rose et d’une maigreur transparente, mais dur à la fatigue et toujours prêt. Il ne se fit pas appeler deux fois, il dégringola d’un trapèze où il prenait ses ébats et sauta en voiture avec sa tunique du lycée, une seule bretelle et point de gilet. Cette tenue ne lui serait plus permise à l’heure où j’écris, car un capitaine doit l’exemple à ses hommes, et Camille a gagné ses épaulettes à vingt-deux ans sous les ordres du brave Denfert, aux avant-postes de Belfort.

La carriole ainsi lestée s’achemina au petit trot vers le village de Marmoutier que les exploits du sergent Hoff n’avaient pas encore rendu célèbre. Nous ne nous doutions guère, en voyant la jeunesse du cru bayer aux corneilles sur la route, qu’elle récolterait trois croix et sept médailles militaires dans la campagne de 1870, et qu’elle laisserait cinq morts à Gravelotte seulement, sans préjudice des autres batailles !

Après Marmoutier, Wasselonne, où nous descendions de voiture pour prendre le chemin de fer à deux sous. On désignait sous ce titre familier