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STRASBOURG.

prodigieuse, que le renégat Traut, ancien conseiller de préfecture, chevalier de la Légion d’honneur, disait en sortant de l’audience : « Ce discours m’a serré la gorge ; je le sens encore là. » Quelqu’un lui répondit : « Cela vous passera, monsieur ; vous avez avalé bien autre chose… »

En somme, le barreau de Strasbourg parait définitivement réduit à treize membres, stagiaires compris, et la bazoche ne compte plus que quatre avoués : tous les autres ont purement et simplement fermé leurs études, sans demander ni attendre un sou d’indemnité. Un notaire, M. Momy, a fait de même ; il ne sera pas le seul, dit-on.

Ce qu’on peut encore prévoir dès aujourd’hui, c'est une grève des plaideurs, qui épuiseront tous les moyens de conciliation avant de réclamer la justice allemande. Il y a des précédents. Par exemple, à Sarreguemines, durant plusieurs mois, M. Richert, ancien président du tribunal français, a été contraint de juger plus de quarante procès civils. Les plaideurs le relançaient dans son domicile privé, ils lui disaient : « Nous n’acceptons pas la juridiction de l’ennemi. Nés citoyens français, fermement résolus à vivre et à mourir dans le culte de la patrie, nous ne nous soumettrons qu’à la justice française, et c’est vous qui la représentez ici : jugez-nous ! Celui que vous aurez condamné exécutera de bonne grâce, et sans appel. » Cette