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STRASBOURG.

compensé, et quoique le ministère public eût pris soin de me récuser, mes trois horribles scélérats obtinrent le bénéfice des circonstances atténuantes.

Aujourd’hui, l’avouerai-je ? rien ne me semble plus naturel et plus logique que la peine de mort appliquée aux assassins. La guerre a renversé mes idées, la vue du sang versé à flots m’a guéri de cette sensibilité tant soit peu maladive que les délices énervantes d’une longue paix développent dans les âmes. Qu’est-ce que la guerre, sinon la peine de mort appliquée sur une grande échelle à des milliers d’innocents ? Comment ! nous avons vu périr de mort violente, en quelques mois, plus de cent mille hommes de cœur, l’élite de la nation, la fleur de la jeunesse, l’espérance du pays, et nous pourrions nous apitoyer sur le sort d’un infâme gredin qui a tué son père ou sa mère ! Nous voyons que la fin du dix-neuvième siècle sera ensanglantée par des luttes gigantesques, meurtrières, formidables : les Prussiens, en foulant aux pieds l’éternelle justice et le droit sacré des nations, nous condamnent à élever nos fils pour tuer et pour être tués ; et l’on perdrait son temps, on userait son éloquence à disputer au bourreau quelques litres de sang inhumain ! Autres temps, autres idées… j’allais dire : autres vérités !

Les Allemands ne se hâtent pas de reconstruire le Palais de Justice ; mais, en revanche, nos avo-