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STRASBOURG.

mais où ? D’ailleurs on n’emporte pas sa clientèle et son crédit avec soi. »

Le faubourg de Pierre, par où j’ai commencé ma triste promenade, est encore une vaste ruine. On a rebâti quelques maisons en façade dans le voisinage du quai ; mais les trois quarts des terrains semblent abandonnés par leurs propriétaires. Ce n’est pas faute d’argent, puisque les ennemis ont offert de payer et payent en effet la reconstruction à mesure qu’on l’exécute ; mais la main-d’œuvre fait défaut. Les ouvriers de Strasbourg ont été de tout temps bons Français et honnêtes gens ; s’ils avaient eu la colonne Vendôme à garder, ils ne l’auraient pas abattue sur un lit de fumier. Le contact des Prussiens leur soulève le cœur : ils vont en France. On ne s’accorde pas ici sur le total de l’émigration : les uns la portent à 30,000 âmes, les autres la réduisent à 8 ou 10,000. Il sera toujours impossible d’obtenir un renseignement exact, car les pères de famille qui envoient leurs fils à l’intérieur ne vont pas, et pour cause, le déclarer à la police. Mais on sait plus exactement le compte des étrangers qui s’installent à la place de nos émigrants ; et s’il est vrai, comme on me l’assure, que 17,000 Allemands ont élu domicile à Strasbourg, c’est qu’autant d’Alsaciens ont laissé leurs logements vides. Il faudrait ajouter à ce chiffre un nombre de 4 à 5,000 per-