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STRASBOURG.

livrés à l’Allemagne, ils sont affreusement gambettistes.

Pardonnez-leur : ils jugent le grand chef de la République radicale avec le cœur plutôt qu’avec la raison ; ils n’ont pas vu de près les fautes de sa dictature. Ce qu’ils ont su par les journaux, c’est que le citoyen Gambetta ne s’est jamais lassé de décréter la victoire ; qu’il a voté contre la paix ; qu’il eût laissé brûler la France entière plutôt que d’en céder une parcelle à l’ennemi… Cette obstination les touche. Ils n’examinent pas si le gouvernement de Tours a bien ou mal employé les ressources du pays ; s’il a conduit la guerre par principes ou par boutades ; s’il a fait acte de courage ou de témérité insensée ; si c’était véritablement résister aux Prussiens que d’accumuler sur leur route de grands troupeaux d’hommes mal nourris, mal chaussés, armés pour la forme, exercés en huit jours, et commandés en dépit du sens commun. Ce qu’ils voient clairement, c’est que la guerre est finie et que Gambetta voulait la pousser à outrance ; c’est que leur province est livrée, et que Gambetta voulait la garder à tout prix ; c’est qu’ils sont les plus malheureux des hommes, et que Gambetta s’est flatté, jusqu’à la dernière heure, de les sauver, sans dire comment. Voilà pourquoi le dictateur de Tours et de Bordeaux sera toujours un grand citoyen en Alsace.