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STRASBOURG.

sa personne. Ce n’était pas le petit baron Pron, préfet des plus salés, des plus fringants et des plus capricants sous l’empire : en présence de l’ennemi, ce danseur administratif fit des miracles d’intrépidité gaie ; ses ennemis eux-mêmes confessent qu’il fut un héros, trop régence peut-être et presque gamin par moments, mais solide comme la vieille garde. N’est pas gamin qui veut devant la mort, et ce tempérament n’est pas des plus communs, même en France. Le conseil municipal, composé, en très-grande majorité, d’hommes tranquilles et froids, d’honnêtes buveurs de bière, ne fut ni moins stoïque, ni moins grand, dans sa simplicité bourgeoise, que les sénateurs romains du bon temps. Des jeunes gens obscurs, voués aux professions les plus pacifiques, mêlaient leur sang avec joie au sang des soldats et des marins.

Le général Uhrich s’est exposé comme les autres défenseurs, et même un peu plus que les autres : on ne l’accuse pas d’avoir pris trop grand soin de sa vie. S’il a commis quelque péché de négligence, oublié de tenir un journal des opérations du siége, et violé ainsi l’article 253 du règlement sur le service des places, c’est un détail que les Alsaciens ne prennent pas la peine d’éclaircir. Non, son seul tort aux yeux du peuple est de n’avoir pas fait tuer assez de monde, d’avoir hissé le drapeau blanc lorsque la brèche n’était qu’à moitié praticable,