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STRASBOURG.

on sortait, on allait à ses devoirs, à ses affaires, et même à ses plaisirs. Je sais une maison où trois ou quatre amis venaient faire le whist pour se distraire. Les enterrements étaient suivis du cortége accoutumé. Les pompiers éteignaient les incendies sous une pluie de projectiles, et luttaient corps à corps avec la destruction.

Lorsque, le 11 septembre, les Suisses, nos seuls amis en Europe, obtinrent du général ennemi l’autorisation d’emmener les femmes, les enfants, les vieillards et les malades, la ville accueillit leurs honorables et courageux délégués avec une ardente reconnaissance ; mais des milliers de femmes refusèrent de quitter leurs maris. Quant aux hommes, ils s’affermirent dans leur devoir et flétrirent, par une résolution du conseil municipal, tout citoyen valide qui s’était soustrait au danger. Plus la ville devenait inhabitable, plus on se cramponnait à ses ruines, et plus on repoussait l’idée d’ouvrir la porte aux destructeurs.

Cependant la garnison était à bout de forces : elle comptait 700 morts, 1300 blessés ou malades, beaucoup de canons hors de service ; et les chefs militaires, moins enflammés que la population civile, pensaient qu’il était temps d’en finir. Le difficile fut de convaincre les habitants. Au premier mot de capitulation, les femmes elles-mêmes bondirent : « Nous n’avons pas assez souffert, nous