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STRASBOURG.

roce ! Ces sauvages patelins, ces Peaux-Rouges fardés d’honnête bonhomie, nous ont trompés jusqu’à la dernière heure. Je me rappelle fort bien qu’au début de cette malheureuse guerre on se flattait de les trouver sinon favorables, au moins neutres. La France ne leur voulait aucun mal. Le seul dissentiment entre eux et nous, c’est que nous ne souhaitions point qu’ils fussent mangés par la Prusse, tandis qu’ils avaient faim d’être mangés.

Ils ont brûlé Strasbourg pour plaire à celui qu’ils appellent, dans leur admiration naïve, l’homme de fer et de sang. Ils ont été les valets du bourreau, et, suivant un usage vénérable, ils se sont adjugé la chemise et les souliers du condamné. Aussitôt que l’Alsace a été vaincue et désarmée, on a vu les honnêtes citadins et les braves paysans badois accourir en pantoufles à la conquête des mobiliers français. Ils traînaient des fourgons derrière eux, comme au temps des grandes invasions germaniques, et ils dévalisaient de préférence leurs anciens amis, ceux dont ils avaient essayé le piano, dégusté la cave, admiré les armoires, envié le beau linge blanc. Estimables Badois, si ces biens mal acquis vous faisaient le profit que vous en espérez, la divine Providence perdrait son nom ; il faudrait l’appeler Complicité divine !

Mais c’est du présent qu’il s’agit. Voyons ce qu’ils