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DOULEURS ET DÉFAILLANCES.

son pain et qui se moque du reste. La traduction fut savamment élucubrée par l’archéologue Dagobert Fischer. Celui-là n’est ni avoué, ni avocat, il n’a pas d’enfants à nourrir, c’est un vieux garçon, bien partagé de la fortune, soigneux conservateur de son patrimoine et qui n’a besoin de rien pour lui-même. J’ai sous les yeux une lettre qu’il écrivait la semaine dernière ; il y professe les meilleurs sentiments pour la France, « que nous considérons toujours, dit-il, comme notre patrie. » Ce n’est pas le langage d’un renégat. Mais ce brave homme, qui n’est plus jeune, a germanisé toute sa vie ; il a respiré la poussière de nos archives, il s’en est imprégné, il se meut dans le moyen âge alsacien, comme un vieux poisson rouge dans un bocal d’eau croupie. Son archéologie et sa littérature, médiocrement appréciées dans nos pays, ont obtenu quelque ombre de succès dans quelque coin de l’Allemagne. Il n’est guère qu’un maniaque à Saverne, il est un demi-savant et une façon d’homme de lettres sur la rive droite du Rhin. De là ses demi-sympathies pour l’Allemagne et l’espèce de complaisance qu’il met dans ses rapports avec l’ennemi. En traduisant les basses flatteries du petit Fetter, peut-être a-t-il rêvé que les érudits de sa sorte sont comme des ponts vivants que la Providence a jetés d’une nation à l’autre. Peut-être aussi les soins du mot à mot, le tour des phra-