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O kanomp breman drin drin drin,
Tapet eo Merlik me sonj din,
O kanomp breman deiz ha noz,
Eman Merlik ’ nen eur plas kloz.



Surpris, le loup hurla à la mort. La musique se fit tendre et douce ; alors, il se tut. De toutes ses oreilles, il écoutait la mélodie et, confusément, son cœur de bête était remué par la chaleur des notes, vibrait obscurément à l’envolée de la magique mélopée. Les yeux mi-clos, il se coucha, au fond du trou, son museau endolori sur ses pattes, et Riwall le dompteur, le croyait subjugué par son biniou ensorceleur.

Va mamm-goz a lare d’in-me ;
Diwall demeuz ar forez-se !
Meus-me da ziwall euz netra
Met euz eur plac’h a drivac’h vla.



Le biniou se tut… La magie envolée le loup redevenu loup et plus loup que jamais, furieux peut-être de s’être laissé attendrir, se releva et avança sur Riwall. Celui-ci vit la bévue qu’il venait de faire. Il aurait mieux valu pour lui, casser son biniou. Maintenant, il lui fallait sonner, et sonner sans relâche ou les dents acérées allaient l’occire sans délai. Alors, il joua, joua, à en perdre l’haleine, et tandis qu’il jouait, le loup reculait, mais aussitôt qu’il cessait, l’animal revenait à l’attaque. Riwall enflait ses joues. Il clama tout son répertoire : airs de danse, jabadao, pache-pi, jibidi, tous les contre-pas de l’Arré. Et, lorsqu’un instant, il s’arrêtait pour souffler, le loup s’apprêtait à bondir en grognant. De longues heures s’écoulèrent ainsi depuis sa chute. Il n’avait plus qu’un espoir, tenir jusqu’au jour, être entendu par les montagnards. Quand il eut dévidé tous ses