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bruyères et le délicieux parfum du miel et des roses. Naïk ! tendre pen-herez, douce fillette au collier d’or ! Naïk, espoir affolant de maints galants, rêve mirifique de maints héritiers ! Naïk, adorable créature, pour sûr que le pacte de Satan fut rompu et que votre gracieuse jeunesse n’était que le sourire du bon Dieu !

Et Naïk était jolie ! et Naïk avait vingt ans ! Ô l’ultime poésie de l’amour, magie du cœur et du rêve qui passe dans un rire éblouissant sur les dents de nacre des pen-herezed, aux cheveux d’or…

Or, il advint que la petite Naïk aux cheveux d’or tomba malade. Ah ! ce fut bien du chagrin sur la Métairie et Mac’harit pleura toutes les larmes de son corps. Oui, sans rime ni raison, Naïk tomba malade. Ses joues roses pâlirent, ses yeux magnifiques s’attristèrent, son fin visage s’allongea. On eût beau quérir les médecins, rien n’y fit. La jeune fille languissait toujours et la science, malgré une quantité incroyable de remèdes, se déclara impuissante à guérir la patiente, Mac’harit alors s’adressa au ciel, fit des vœux et des offrandes, pèlerina pieds nus dans d’innombrables sanctuaires, mais le ciel resta sourd à sa prière et les saints indifférents à ses plaintes. Naïk pâlissait toujours, maigrissait, avec un pauvre sourire, si triste que les pierres du manoir en eussent pleuré. De guerre lasse, on appela la « sorcellerie » à la rescousse. Mais il n’était point de puissance occulte efficace contre le mal mystérieux qui minait la jolie Naïk.

Naïk aimait écouter le chant des fileuses entre deux pauses du rouet. Un jour, l’une d’elles, en dévidant son fil, entonna une complainte mélancolique relatant les amours d’une jolie « pen herez » Pried Kalvez et de son galant, Kloarek an Amour, amours détruites par la main criminelle du fameux marquis de Guerrand, de sinistre mémoire. Kloarek an Amour avait invité sa douce aux ébats de