chez le desservant de Loqueffret qui, après lui avoir remis la même somme, lui tint à peu près ce langage :
— Mon fils, ce chien que vous avez là est destiné à Len-ar-Youdic. C’est une âme en peine. Votre curé vous a envoyé à Laz la prendre et vous allez assister à sa conjuration. Dans les marais, quand vous sentirez l’animal tirant la corde, lâchez-le et couchez-vous !
Cela n’eut pas le don de réjouir le sacristain qui tremblait en s’en allant alors que le chien prenait les devants. Ah ! certes, il avait perdu sa belle prestance, Yann Jezequel ! Pensez donc, tenir en laisse une âme en peine ! Plus d’un à sa place aurait lâché net ce chien terrible ! Mais, diable, dans ces affaires-là, le parti le plus sage est encore d’obéir ! Ainsi raisonnait l’homme qui, dans son for intérieur, jurait comme un brigand, maudissant ces prêtres et leurs sorcelleries et ne s’interrompant de jurer que pour réciter avec ferveur, Pater sur Pater ! C’est avec ces idées, plus ou moins gaies, qu’il s’engagea dans le « Yun ».
La nuit était encore loin, pourtant le temps était sombre. Et là-bas, du côté de Saint-Michel, le ciel était livide. Pas un souffle de vent, un calme étrange pesant sur tout ! Yann allait, la gorge sèche, les dents serrées, le cœur battant à grands coups et les jambes quelque peu molles. À mesure qu’il approchait de Len-ar-Youdic, le chien filait plus vite. Le sacristain avait peine à le suivre et tenait serré dans sa main, son pen-baz et la laisse. Dans l’ombre d’un talus brillèrent les yeux d’un loup, qui s’éloigna soudain comme si le diable en personne eût été à ses trousses. « Oh ! va Doué ! murmurait Yann, que va-t-il m’arriver ? Un cierge à Saint-Herbot, si je m’en tire vivant ! »
Tout à coup, Len-ar-Youdic apparut. L’animal renifla avec force, nez au vent, et tira sur sa laisse. Yann tint bon malgré la recommandation du curé. Alors, il fut projeté sur le sol avec violence. Le chien lui échappa et, avec un