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collaient à la peau, il s’arrêtait un instant pour respirer.

L’Angelus sonnait quand Yann frappa à la porte du presbytère de Laz. La « carabassen » vint ouvrir. Elle regarda, avec méfiance, ce grand gaillard aux longs cheveux bouclés dont l’habillement lui était inconnu.

— Que voulez-vous d’ici, « estranjour » ? dit-elle d’un ton rude.

— Le maître, Monsieur votre curé, répondit-il, laconique.

— Et que lui voulez-vous donc, va Doué ?

— Lui donner ceci.

Et il extirpa de sa poche la lettre soigneusement pliée en quatre. La mégère prit le billet, et, s’obstinant à ne pas laisser passer le visiteur, elle lui ferma la porte au nez… Monsieur le curé, en personne, vint le prier d’entrer !

Yann passa la nuit à Laz. Comme il partait, le prêtre vint, tenant en laisse un grand chien jaune tacheté de roux.

— Voici, dit-il, une bête qui appartient au recteur de Châteauneuf. Remettez-la-lui : pour votre peine voici deux écus. Allez, mon fils, que Dieu vous garde !

Le sacristain partit, joyeux, traînant après lui son compagnon qui, d’ailleurs, le suivait volontiers. Deux écus pour mener un chien si docile, quelle aubaine ! Yann rayonnant, entra donc d’un air d’importance chez le curé de « Kastelnevez ». Diable ! ce digne homme se défendit d’être le propriétaire du chien qui ne semblait lui manifester aucune sympathie. Le convoyeur, surpris, fut, après avoir encore reçu deux écus, invité à se présenter avec son animal au prochain presbytère. Là, toujours la même chanson ! On lui donna deux autres écus, mais on refusa le chien. Yann commençait à faire grise mine. Il erra ainsi de presbytère en presbytère, traînant après lui son chien fidèle. Sans grande conviction, il vint pourtant échouer