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ou des professions masculines leur semblèrent un moyen plutôt qu’une fin : et elles furent féministes, non seulement pour se réaliser entièrement elles-mêmes, mais pour mettre des énergies encore inexploitées au service de leur pays et de l’humanité. Négligeant la politique pure, les affaires extérieures et les finances, elles s’attachèrent passionnément à ces questions sociales qui tiennent en une seule ligne : recherche du mieux être et du bonheur de tous. Leur cœur, leur sens pratique, leur fine intelligence trouvèrent ample matière à s’y exercer. Dans les derniers Congrès, le « struggle for vote » ne tient qu’une place restreinte : chômage, travail à domicile, protection de l’enfance, alcoolisme, voilà les questions longuement discutées.

L’idée de faire, par le triomphe du féminisme le bonheur du monde, n’est pas absolument nouvelle : les femmes de la Révolution la professèrent. À la barre de l’Assemblée Constituante elles dépouillent « les vains ornements de la vanité » pour en faire hommage à la Patrie et conjurer la crise de l’or, ou, formant des bataillons d’ardentes amazones jurent d’exterminer les tyrans. Mais il leur manquait l’organisation. C’est la supériorité de nos féministes d’avoir possédé celle-ci bien avant la guerre. Habituées à la discipline, au travail méthodique, avides d’action et capables d’agir, merveilleusement averties de la complexité des problèmes économiques et désireuses de les résoudre pour le bonheur de tous, nos féministes ont pu non seulement agir par elles-mêmes mais former les cadres d’une mobilisation générale des femmes.