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ment à des milliers d’enfants. Nous ne connaissons pas dans le détail les programmes. Mais les petites écoles sont qualifiées écoles de grammaire et l’on y étudie la lecture, l’écriture, le catéchisme et les premiers éléments du français. Nous ne savons pas si, comme dans les établissement tenus par les sœurs, un enseignement professionnel était prévu.

En somme, Paris apparaît bien comme la région du royaume où le nombre des écoles était le plus considérable, où les efforts les plus sérieux et sans doute relativement les plus heureux ont été faits pour développer l’enseignement féminin. Et lorsque Rétif de la Bretonne parle de l’ignorance absolue des filles du peuple et les met pour la culture intellectuelle et le développement moral au même niveau que les sauvagesses les plus grossières, c’est une imagination de littérateur, non l’expression de la vérité.

vi. Ses insuffisances et ses lacunes

Est-il possible, après avoir parcouru les différentes régions de la France, de se faire une idée d’ensemble de l’enseignement et de relever, malgré l’insuffisance de notre documentation et la diversité que nous constatons suivant les régions, quelques traits généraux ? Oui, à condition de procéder avec prudence et sans faire de généralisations trop absolues. Et voici, semble-t-il, les caractères les plus marquants. Ni le gouvernement central, ni les intendants ne se préoccupent sérieusement d’assurer l’enseignement primaire féminin. Les dispositions des ordonnances de 1698 et 1942 restent très souvent lettre morte sans qu’à part de biens rares exceptions, les intendants se préoccupent d’en rappeler les prescriptions à leurs administrés[1]. Les autorités locales semblent s’intéresser davantage à l’enseignement féminin, les curés et de généreux particuliers les secondent de leur mieux. Mais le développement de l’enseignement primaire féminin se heurte à maints obstacles. D’abord la pénurie de personnel enseignant ; en dehors des religieuses, très peu de femmes sont capables d’être de bonnes maîtresses d’écoles ; les maîtresses laïques, parfois infirmes ou totalement incapables, voire illettrées, transforment trop souvent leurs classes en simple garderies. Les sœurs elles-mêmes peuvent tout au plus distribuer un enseignement primaire très élémentaire,

  1. Nous relevons seulement un intendant qui prononce des amendes contre les mères qui ont négligé d’envoyer leurs enfants à l’instruction religieuse.