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Aussi, si Louis XV et Louis XVI tiennent scrupuleusement les engagements du Grand Roi, si au cours du xviiie siècle, la Maison Royale de Saint-Cyr, loin de péricliter, s’enrichit jusqu’à devenir l’un des grands propriétaires du royaume, la faveur royale se détourne d’elle. Les filles de Louis XV sont élevées à l’abbaye de Maubuisson, où d’ailleurs l’enseignement est détestable.

iii. Instruction secondaire des hautes classes

Après l’arrivée au pouvoir de Marie Leczinska, Saint-Cyr voit naître une concurrente : l’institution de l’Enfant Jésus[1], où l’on élève 35 filles nobles qui, leurs études achevées, sont gratifiées d’une bourse de quinze cents livres. Mais l’enseignement est loin d’être comparable à celui de Saint-Cyr. La partie principale du programme est le travail manuel et l’enseignement ménager. Malgré tout, Saint-Cyr reste l’établissement modèle d’enseignement secondaire.

D’ailleurs, comme le remarque fort bien M. Gréard, l’enseignement collectif fut, au cours du xviiie siècle, en défaveur. Sans doute deux grands établissements religieux, le couvent du Panthémont et celui de la Présentation, reçoivent-ils à Paris les jeunes filles de la noblesse, et il existe un grand nombre de communautés où vont se faire instruire les jeunes filles de la haute magistrature et de la grande finance. « Dans ces écoles, discipline, forme d’éducation, régime intérieur, toute la règle n’est qu’une imitation de la règle de Saint-Cyr. Partout on retrouve l’inspiration de cette maison modèle, la trace de ses divisions en quatre classes, distinguées, selon les âges, par des rubans bleus, jaunes, verts et rouges. Partout, c’est une éducation flottant entre la mondanité et le renoncement, entre la retraite et les talents du siècle, une éducation qui va de Dieu au maître d’agrément, de la méditation à une leçon de révérence[2]. »

Il semble que l’on n’ait pris, dans le programme de Saint-Cyr, que les parties brillantes en négligeant absolument ou presque ce qui en faisait la solidité, qu’on ait sacrifié à l’éducation — et non à l’éducation largement entendue dans le sens d’une formation morale, mais à l’éducation mondaine — l’essentiel de l’instruction. D’ailleurs, s’il faut en croire les contemporains, il était bien diffi-

  1. Fondée par Marie Leczinska et subventionnée par elle.
  2. Goncourt. La femme au xviiie siècle.