Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/490

Cette page n’a pas encore été corrigée

Les prétentions féminines à prendre part aux affaires publiques ou à contribuer pour leur part au salut de l’État parurent, à quelques hommes, extravagants, et l’antiféminisme se déploya dans plusieurs brochures assez mordantes, mais où la fantaisie et l’ironie plaisante tiennent heu d’arguments sérieux.

L’un rédige une réponse aux protestations des dames, la Protestation de l’ordre le plus nombreux de France, celui des C… où, après avoir daubé sur les émancipées, « qui perdent du côté de la chasteté ce qu’elles gagnent du côté des connaissances », il propose que « toute femme bel esprit s’érigeant en auteur soit condamnée par la société à retourner à son filet ou à son aiguille ». Presque tous les réquisitoires antiféministes sont écrits de ce style. Ils ne méritent pas que l’on s’y arrête.

D’ailleurs, le procédé le plus communément employé pour discréditer le féminisme est, nous l’avons vu, le lancement de fausses brochures féministes. En somme, nul n’ose aborder de front le problème et, en face des théoriciens du féminisme ne se dresse, de 1788 à 1790, nul théoricien de l’antiféminisme. Sans doute, les adversaires même du féminisme jugent-ils les revendications (à l’exclusion de celles, les moins nombreuses, qui concernent les droits politiques) comme raisonnables. Sans doute, surtout, ont-ils conscience que, pour la rénovation totale de la France, les femmes sont une grande force qu’il importe de se concilier. Et tel est à ce moment le point de vue de ceux-là mêmes qui seront plus tard les adversaires du féminisme.