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Élever de nouvelles maisons de correction pour les filles de joie[1], reléguer les femmes galantes dans des quartiers spéciaux et forcer les actrices mêmes, présumées par définition peu honnêtes, de distinguer leurs maisons par une enseigne[2], sont les mesures les plus souvent proposées. Le projet d’assemblées de quartier pour la ville de Paris propose une mesure plus radicale ; la monopolisation par l’État de la prostitution. « Si, dit-il, après Restif de la Bretonne[3], la prostitution est indispensable dans un État où la loi commande le célibat, où le luxe et la pauvreté l’encouragent, ces assemblées pourraient juger si l’établissement de parthénons ne seraient point préférables à cette équivoque manière de tolérer et de proscrire tour à tour un mal qu’on dit nécessaire ». L’auteur anonyme ne s’explique pas sur ce que seraient les parthénons, mais on le devine aisément. Mais si sa réforme est peu pratique, du moins a-t-il pénétré les causes profondes du mal.

L’auteur des additions aux projets de cahier voit, lui, le salut dans une réglementation plus sévère des hôtels garnis et dans les lois répressives applicables aux femmes entretenues[4].

Un seul cahier, celui du clergé de Vouzon, demande que l’on favorise et que l’on multiplie les maisons établies pour « retirer les personnes du sexe qui, prévenues de leurs égarements, cherchent un asile contre la séduction ».

Les théories des écrivains qui réclamaient l’égalité civile des deux sexes n’ont pas laissé également d’avoir quelque influence. Et, du moment où l’on songe à une réforme générale de la législation, quelques-uns pensent à faire disparaître les inégalités choquantes qui, au détriment des femmes, subsistent dans les lois. À vrai dire, les revendications de cette nature sont assez peu nombreuses. Seuls les cahiers de Neury-en-Sullan (bailliage d’Orléans), du Tiers-État de Cambrai, du Tiers-État de Chartres s’élèvent contre le droit de masculinité et demandent que les successions soient partagées également entre les enfants. Encore ne s’agit-il, pour eux, que de successions roturières.

  1. Cahier du Tiers-État de Bordeaux.
  2. Brochure déposée à l’assemblée du clergé.
  3. Qui avait exposé ces idées dans le Pornographe.
  4. « Qu’il soit défendu aux femmes de tout étage d’avoir un hôtel et d’occuper un appartement au-dessus de 400 livres, qu’il leur soit interdit de louer des loges à l’année. »