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CHAPITRE IV
LA QUESTION DU MARIAGE
i. La femme pourra-t-elle choisir son mari ?. — ii. Les rapports entre les époux. L’égalité des époux. — iii. La question du divorce. — iv. Les théories de l’union libre. — v. Les filles-mères. — vi. Les droits de la mère.


La femme sera-t-elle, dans le mariage et la famille, l’égale de l’homme ou son inférieure ? Les écrivains du xviiie siècle, comme ceux du xixe, se sont posé la question. Selon qu’il en ira d’une manière ou d’une autre on peut envisager, en effet, une société bien différente. Dans le premier cas, une restauration du patriarcat à la manière antique ; dans l’autre, une organisation nouvelle où la femme saura mettre au service de la communauté familiale, et pour le plus grand avantage de la société, des aptitudes trop longtemps négligées.

Or, ni l’une ni l’autre de ces conceptions n’est alors réalisée. La société, la famille continuent, nous l’avons vu, de reposer sur le mariage chrétien, c’est-à-dire sur la subordination féminine. En fait la femme est émancipée, du moins dans la classe riche et chez les ouvriers des villes. Mais cette émancipation, toute de fait, est précaire, aucune loi ne protège la femme dans son corps ou dans ses liens contre la tyrannie maritale, s’il plaît à celle-ci de prononcer un retour offensif. D’ailleurs, lorsque l’émancipation féminine est réelle, trop souvent elle aboutit à la dissolution pure et simple de la famille. La richesse des grands, la misère du bas peuple ont, à ce point de vue, les mêmes effets. La femme et la société souffrent pareillement de cette contradiction entre les lois et les mœurs.

Aussi, la plupart des écrivains sont-ils d’accord pour faire la critique de l’institution du mariage, particulièrement en se plaçant au point de vue du rôle et des droits de la femme. Mais, non plus que sur l’éducation féminine, ils ne semblent s’être mis d’accord sur les réformes à faire et les nouvelles règles à établir.