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Comme en Angleterre, où une femme, lady Montagu, a lancé, la première, la vaccination, les femmes mettent à la mode l’inoculation.

Mlles  de Chartres, de Vaucauson et de Senectère, la marquise de Villeroi, la comtesse de Forcalquier donnèrent à la Cour l’exemple[1].

Il est de bon ton de se faire inoculer et « la pratique en est si générale que les marchandes de mode ont inventé les bonnets à l’inoculation » [2].

Quand Tronchin recommande les exercices physiques et l’hydrothérapie, sa célébrité est faite pour une large part de la réclame que lui font les femmes. Dès les premières heures de la journée, elles se pressent si nombreuses à sa porte que la rue où il demeure est embarrassée de voitures et de carrosses. Suivant ses prescriptions, elles s’adonnent à tous les exercices physiques, abandonnent leur lit de bonne heure pour fréquenter les allées du Bois et, en même temps que les bonnets à l’inoculation, les marchandes de mode lancent la tronchine, robe de chambre faite pour la sortie du matin[3].


v. Influence des femmes sur les mouvements littéraires
Leur rôle dans la diffusion des idées philosophiques. Les salons.


« C’est en grande partie sous la forme parlée que les idées du xviiie siècle ont pénétré dans les hautes classes[4] », a dit l’un des plus savants historiens de la littérature française. Cette appréciation est pleinement justifiée et elle permet de comprendre le rôle capital qu’ont joué les salons. Or, le salon, c’est la femme qui le préside. Jeter un coup d’œil sur les principaux salons du xviiie siècle, c’est donc se rendre compte encore, et de la façon la plus sûre, de l’influence exercée par les femmes sur la vie littéraire.

Sous le règne de Louis XV, et à la veille de la Révolution, toute femme un peu cultivée, grande dame ou bourgeoise, parisienne ou provinciale, se juge destinée à gouverner au moins un canton de la

  1. La Condamine. Histoire de l’inoculation.
  2. Correspondance littéraire, 1756.
  3. Correspondance littéraire, ibid.
  4. Brunel. Salons, dans Histoire de la littérature française, de Petit de Julleville, tome VI.