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de Chambray fait agir à la Cour par le cardinal de Rohan et envoie mémoire sur mémoire à l’évêque de Séez et au Conseil du roi. Elle doit cependant, en 1737, exécuter les ordres royaux et transporter à Argentan toute la communauté.

Nous avons donné quelques exemples caractéristiques de conflits entre les communautés de femmes et l’autorité ecclésiastique ou laïque. Ils montrent que, chez les religieuses des anciennes abbayes, l’attachement à leurs privilèges était un des sentiments les plus puissants et que, d’autre part, ces privilèges, ainsi que tous les privilèges féodaux, tombaient en décadence. Ces conflits stériles et la mauvaise situation financière de la plupart des abbayes semblent détourner les religieuses de toute autre préoccupation, les empêcher de remplir tout autre rôle social.

iv. Rôle dans l’instruction des filles

Cependant, dans quelques couvents de province et dans un grand nombre de couvents de la capitale, les religieuses de Saint-Benoît, de Cîteaux, de Fontevrault se consacrent à l’éducation des filles de la noblesse et de la bourgeoisie ou même du peuple. Ce rôle, il semble d’ailleurs qu’elles le remplissent beaucoup moins par esprit charitable ou vraiment religieux, que pour obtenir les ressources qui, à la fin du xviiie siècle, font défaut aux communautés de plus en plus appauvries[1].

Les religieuses des ordres mendiants, au contraire, ont conservé dans une plus large mesure l’esprit de dévouement et de charité, et leur rôle social est bien plus important. Le soulagement des pauvres, le soin des malades, l’instruction des enfants des deux sexes indigents ou peu fortunés sont la raison d’être des établissements qui suivent la règle de saint Augustin, des Visitandines, des Ursulines, des Sœurs grises, Hospitalières, Dames du Bon Pasteur ou de telles communautés plus particulièrement développées dans certaines provinces : Sœurs de la Sagesse et Union Chrétienne en Bretagne et en Normandie, Filles de Saint-Charles ou de Notre-Dame en Lorraine.

Comme nous l’avons vu déjà, la plupart des établissements qui dispensent aux filles du peuple et de la bourgeoisie l’instruction gratuite ou à très bon marché sont entre les mains des religieuses.

  1. L’abbaye du Panthémont, à Paris, a une école célèbre. Les Bénédictines ont des établissements à Aix, Châlons, Cusset, Metz, Nancy, Limoges, Laval, Nantes ; les religieuses de Fontevrault, à Tarbes (Arch. Nation., D. XIX, 1 à 6).