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relevons dans les archives provinciales sont adressés aux abbesses de différentes abbayes, particulièrement des abbayes bénédictines[1].

L’abbesse des Bénédictines de Saintes, l’abbesse de Saint-Laurent de Bourges, l’abbesse de Montivilliers, l’abbesse de Fontevrault, l’abbesse de Jouarre ont encore, au xviiie siècle, de grands domaines et des vassaux nombreux.

L’abbesse de Fontevrault, celle de Saintes sont, à ce point de vue, particulièrement favorisées. L’abbesse de Saintes qui, jusqu’au xve siècle, avait exercé le droit de battre monnaie, restait encore à la veille de la Révolution un important seigneur féodal. Ses domaines s’étendaient sur une grande partie du département actuel de la Charente-Inférieure (canton de Saintes, de Marennes, Saint-Laurent-du-Gua, Cormes, Pont-l’Abbé, Île d’Aix). Elle y avait un droit de juridiction dont elle déléguait l’exercice à des prévôts nommés par elle. Au-dessous, des sergents, nommés par elle également, exerçaient le droit de justice dans chaque chatellenie[2].

Mais les abbesses de Saintes et de Fontevrault étaient loin d’avoir l’importance et l’éclat des abbesses de Remiremont. Celles-ci, à la tête d’un ordre qui n’avait guère de religieux que le nom, possèdent des domaines dispersés dans toute la Lorraine (trois évêchés et Lorraine ducale), une partie de l’Alsace et de la Franche-Comté. L’abbesse de Remiremont perçoit les redevances sur plus de 200 villages ou hameaux, nomme à plus de 100 cures situées dans les diocèses de Besançon, Toul, Bâle, Châlons-sur-Saône[3].

Princesse du saint Empire romain germanique, elle tient un rang quasi royal ; les jours de grande cérémonie, elle sort sous un dais de velours, crosse d’or en main. À sa mort toutes les églises de ses domaines sonnent le glas pendant vingt-quatre jours.

Elle exerce le droit de haute, de basse et de moyenne justice en son tribunal qui se tient à Remiremont et a su maintenir ses droits malgré les prétentions contraires des ducs de Lorraine[4]. Longtemps elle a possédé le droit de nommer le maire de toutes les localités qui dépendent de ses domaines. Elle a sans doute, depuis le

  1. Arch. Départ., Loire-Inférieure, H. 350 (abbaye de Fontevrault) ; Cantal, E. 268 (abbaye de Baunesaigue) ; Cher, E. 1633 (abbaye de Saint-Laurent) ; Aube, B. 1089 (Notre-Dame-des-Prés) ; Seine-Inférieure, H. 5363 (Montivilliers).
  2. Arch. Départ., Charente-Inférieure. Introduction.
  3. Cardinal Mathieu. L’ancien régime en Lorraine.
  4. Dictionnaire de jurisprudence : Chanoinesses.