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hommes et parcourant, pour ce faire, les campagnes. En 1746, l’intendant de Rennes mit ainsi la main sur une compagnie qui écumait la Basse-Bretagne. Au milieu d’une vingtaine de malandrins se trouvaient six femmes : Elisabeth Coatantier, Anne Le Baron, Marguerite Gouzouguet, Anne l’Hélias, Marie Rivauler, Louise Camus, Marie Penhat[1]. La première fut condamnée au pilori, au carcan et au fer rouge.

D’autres femmes, sans commettre de délits aussi graves, vagabondent dans les campagnes, tantôt mendiant, tantôt se livrant à la débauche, volant à l’occasion.

Dans ces bandes de femmes déracinées, que nous trouvons surtout en Basse-Bretagne, évidemment parce que le pays est très pauvre et que ni l’agriculture ni l’industrie ne peuvent donner à toutes un travail rémunérateur, on trouve bien des conditions différentes : professionnelles du vol ou de la débauche, mendiantes, vagabondes qui « trimardent » sur les routes, femmes de voleurs et de forçats, marchandes ambulantes, paysannes chassées de leur village par la misère, lingères, domestiques, tisserandes, filandières. Tous les âges également se trouvent représentés. Dans l’une de ces bandes, on voit des vieilles femmes de 74 ans et des fillettes de 14 ans[2].

Rien ne montre mieux l’état de misère où étaient arrivées certaines provinces que la présence de femmes dans ces bandes d’outlaws.

Vainement les autorités provinciales essaient-elles de refréner le vagabondage par des peines sévères ou de le prévenir en instituant des ateliers de charité.

Nous voudrions être fixés, non seulement sur la condition de la femme au village, mais sur son rôle, sur sa vie ; ceci est malheureusement bien difficile. Il faut se la représenter comme soumise, la plupart du temps, à un très dur travail et se délassant par des distractions très simples, les veillées qui, suivant les provinces, se tiennent soit simplement dans l’une des maisons du village, soit un peu à l’écart, dans des huttes isolées ou « écraignes », en Champagne et en Bourgogne, dans des carrières, comme dans la Gâtine vendéenne où l’on file en causant, en entendant des histoires et où l’on reçoit des galants[3]. Il semble que, dans ces assemblées, les femmes

  1. Arch. Départ., Finistère, B. 865.
  2. Arch. Départ., Finistère, B. 868-70.
  3. Babeau. Loc. cit.