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encore de les voir vivre tranquillement avec elles au vu et au su de leurs paroissiens.

Parfois le service domestique émancipe donc en fait les femmes qui s’y livrent et il est rare qu’il constitue une dure servitude.

Enfin, dès ce moment se pose pour les campagnes le problème de l’abandon de la terre et de la dépopulation. Nombreuses sont les paysannes qui quittent les travaux du sol pour s’embaucher dans les villes. Dans un grand nombre de régions, Auvergne, Picardie, Languedoc, les intendants signalent la désertion des campagnes. Ils vont parfois jusqu’à se plaindre, comme tel subdélégué du Languedoc, que l’instruction publique trop répandue dans les campagnes, détourne les campagnardes de la terre et les pousse vers le métier de servantes en nombre excessif.

Depuis la fin du règne de Louis XIV, la misère est assez grande dans certaines provinces pour que bien des gens ne puissent vivre honnêtement et soient obligés, autant peut-être par nécessité que par goût, de vivre en rébellion contre les lois : la femme comme l’homme, et ce n’est pas là un des aspects les moins curieux de la vie des campagnes, est souvent poussée au brigandage. Tandis qu’à la ville elle se tourne vers la prostitution, à la campagne elle s’associe à l’homme pour la contrebande ou le vol à main armée. La contrebande et le faux-saunage sont pratiqués par les femmes comme par les hommes. Et dès la fin du xviiie siècle, le gouvernement royal a dû prendre contre les fausses-saunières des mesures répressives et les déclarer passibles des mêmes peines, des mêmes amendes que les faux-sauniers[1].

Des femmes parcourant les campagnes, volant avec effraction, s’introduisant dans les demeures des particuliers et jusque chez les autorités ecclésiastiques[2].

Les cas de vols avec effraction ou vols nocturnes commis par les femmes sont nombreux dans les régions pauvres de la Guyenne, en Bretagne, en Auvergne.

Des femmes sont affiliées aux bandes de faux-monnayeurs, spécialement chargées de passer les fausses pièces fabriquées par les

  1. Ordonnances royales de 1680 et 1688.
  2. Vol avec effraction commis par Françoise Amit dans l’Orangerie de l’évêque de Sarlat (Arch. Départ., Dordogne, B. 1674).