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prennent de l’éducation des enfants est bien plus considérable aux familles, bien plus important à l’État que celui qu’elles ont des biens. » Voilà des faits et, le premier, Poulain de la Barre formule l’importance sociale de la maternité. Comme les hommes, les femmes ont su organiser à merveille les ordres religieux. Le don du commandement, la science du maniement des hommes ne font pas défaut aux abbesses. Les femmes ont soin des pauvres, c’est leur charité qui dispense les secours aux malades de l’Hôtel-Dieu… voilà des faits encore et dont, cependant, le vulgaire ne tient pas compte, sans doute parce qu’ils lui apparaissent comme tout naturels, mais qui, si on y réfléchissait, modifieraient profondément sa conception du caractère féminin.

Ajoutons, dit Poulain de la Barre, que les femmes ont des qualités particulières : une facilité de parole qui va souvent jusqu’à l’éloquence naturelle, une faculté de parler avec solidité et profondeur des plus hauts mystères, une patience et une diligence, un sens pratique dont elles donnent mille exemples dans le gouvernement de leur maison et le soin des malades. En un mot, les femmes ont toutes les qualités des hommes, sans leurs défauts, et bon nombre de qualités particulières.

N’est-il pas juste qu’elles en puissent user pour leur avantage personnel et le plus grand bien de la société ? Poussant avec une rigueur géométrique ces principes à leurs dernières conséquences, Poulain de la Barre revendique pour la femme l’exercice de toutes les professions masculines. La méthode déductive qu’il emploie est curieuse et mérite que l’on s’y arrête.

Il est suffisamment démontré que les femmes peuvent, comme les hommes, s’assimiler toutes les sciences, mieux, particulièrement réussir dans l’étude de quelques-unes d’entre elles. Mais si l’on possède bien une science, rien n’est de plus facile que de l’enseigner, surtout pour la femme communément douée de patience et du don de la parole.

Donc, la femme peut prendre le titre de docteur, de maître en théologie et en médecine et en l’un et l’autre droit.

L’emploi le plus approchant de celui de maître, c’est celui d’être pasteur ou ministre de l’Église. Sans discuter la parole de Paul le misogyne, Poulain de la Barre se contente d’affirmer que la foi leur est commune avec nous, et que l’Évangile et les promesses ne s’adressent pas moins à elles.

Mais la façon dont il soutient le droit des femmes à gouverner des royaumes annonce Montesquieu. « Il ne faut pas plus d’application, dit-il, pour la conduite d’un royaume, que toutes les femmes en ont pour leur famille et les religieuses pour leur couvent. D’ailleurs,