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bas de soie[1]. Bien des veuves, incapables de garder un appartement, si modeste soit-il, s’arrangent avec une famille amie pour obtenir, moyennant les quelques centaines de livres annuelles qui représentent tout leur revenu, une chambre et la nourriture ; d’autres, et elles sont plus nombreuses encore, se retirent dans les couvents où elles mènent une existence quasi monastique[2].

v. Le rôle charitable de la femme bourgeoise

On n’aurait pas donné une idée complète du rôle joué par les femmes de la bourgeoisie, si l’on ne s’efforçait de les suivre dans l’une des manifestations les plus fréquentes et les plus utiles de leur activité : la bienfaisance.

Nous l’avons dit, les femmes de la bourgeoisie sont, en général, restées croyantes ; comme leurs arrières grand’mères, les bourgeoises du moyen-âge, elles connaissent la vertu salvatrice de l’aumône, manifestation essentielle d’une des trois vertus théologales, la charité. Et cette considération seule suffirait à faire, d’un grand nombre de femmes, des bienfaitrices des pauvres. Mais, il semble qu’entraînées par le mouvement général qui guide alors le monde vers le progrès, les femmes aient, au xviiie siècle, agi autant par humanité que par religion et que leur préoccupation soit, moins de sauver leur âme et celle de leur prochain, que de répandre le bien-être sur la terre et de faire pénétrer les lumières dans les esprits.

C’était une coutume fort ancienne que les personnes riches ou simplement à leur aise laissassent en mourant, aux pauvres, une partie de leurs biens. Nous la voyons très fréquemment suivie dans toute la France par des femmes de toute condition, de toute fortune et de toute situation de famille. Les unes laissent des sommes qui atteignent des milliers de livres, d’autres de modiques offrandes. Ce sont du reste, naturellement, les plus nombreuses. C’est par centaines que dans telles provinces : Lorraine, Languedoc, Auvergne, Normandie, Limousin, on compte les fondations pieuses d’une valeur de trois à cinq cents livres établies par des femmes.

  1. Arch. Départ., Gard, E. suppl. 780.
  2. Arch. Départ., Creuse. Passim.
    Loire. Passim. (particulièrement B. 1132).
    Lozère. Passim.
    Maine-et-Loire. Passim.
    Calvados. Passim (particulièrement H. 560-63, H. 1128 et 1188).