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bre d’ouvrages, aujourd’hui disparus, bon nombre d’autres lui ont échappé. Au début du siècle ce sont les ouvrages de Pierre de l’Escale, ardent champion du beau sexe, et ceux du capitaine Vigoureux, l’Apologie pour les femmes, de Jeanne de Miremont (1602), le traité de l’égalité des hommes et des femmes, de Mlle de Gournay (1612), et les Griefs des Dames, du même auteur. En 1665, paraît La femme généreuse, qui montre que son sexe est meilleur, plus noble, meilleur politique et plus vaillant que l’homme, dédié par Jaquette Guillaume à la duchesse d’Alençon. En 1673 et 1674, Poulain de la Barre fait paraître coup sur coup deux ouvrages capitaux : De l’Égalité des Sexes (1673) ; et De l’Éducation des Dames (1674).

Si la plupart de ces plaidoyers ne sont que d’assez banales variations sur des thèmes connus : constance, fidélité, chasteté des femmes — variations coupées d’ailleurs de vues intéressantes sur l’égalité naturelle des sexes et la possibilité pour la femme de parvenir, par une éducation appropriée, à exercer les mêmes charges que l’homme et les mêmes droits — trois d’entre eux du moins se détachent et témoignent de l’heureuse et féconde évolution subie par le féminisme. Ce sont le Traité de l’égalité des hommes et des femmes, de Mlle de Gournay, et les deux ouvrages de Poulain de la Barre.

Fille d’alliance de Montaigne, la première s’inspire de ses méthodes : universelle enquête et libre critique, appel au bon sens et à la raison contre toute autorité, même religieuse, pour discuter le problème féminin.

Ne nous laissons pas tromper par cette déclaration liminaire : « Je prouverai l’égalité des sexes, non par raison qu’on pourrait débattre, mais par autorité des Pères, de Dieu et des grands Hommes ! »

C’est là une concession plus apparente que réelle à l’esprit du temps et les arguments que lui fournissent les autorités philosophiques et religieuses ne sont pas, quoi qu’elle en dise, les plus nombreux ni les plus forts.

Les raisons que donnent les adversaires des femmes sont, pose-t-elle dès le début, absolument vaines. Ce sont « beaux » mots dont il est facile de démontrer l’inanité. Nulle différence spécifique entre l’homme et la femme, « l’animal humain n’est ni homme ni femme », les sexes étant faits tous non absolument mais « secundum quid », c’est-à-dire pour la seule propagation. Sous la forme scolastique l’idée est claire, c’est la vieille idée platonicienne, la future idée saint-simonienne. L’être humain n’est ni homme ni femme, mais homme et femme ; les deux sexes se complètent, ne s’opposent pas.

L’homme est plus fort ? soit. Mais « c’est une vertu si basse que la