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greffier du présidial, de la Généralité et de l’Université, tous offices de son mari.

Dans le Nivernais, plusieurs veuves gèrent des fermes dépendant du domaine royal, rendent leurs comptes devant la châtellenie. D’autres femmes exercent les mêmes droits comme héritières de leur père.

Enfin, parmi les femmes de détenteurs d’offices de l’ordre moyen, un grand nombre exercent une grande influence sur leurs maris. Elles se montrent orgueilleuses de leur rang et de leur privilège autant que les femmes des nobles et des financiers.

La baillive, l’élue, la lieutenante de judicature sont des personnages importants qui jouissent de la considération générale. Comme l’intendante, la subdéléguée, la femme du secrétaire à l’intendance aspire à jouer un rôle. Parfois elle prend sur son mari une grande influence, surtout lorsque comme il arrive parfois, elle est de condition supérieure à la sienne, et en fait un tyran au petit pied. Le secrétaire de M. d’Estigny, intendant d’Auch, excellent commis jusqu’à son mariage, eut la tête tournée par son alliance avec Mlle de Lerquenfeld, de petite noblesse strasbourgeoise, et se mit à trancher du grand seigneur, à molester les administrés et même à résister à son chef. M. d’Estigny, après s’être heurté plusieurs années aux intrigues menées à la Cour par le premier secrétaire et sa femme, réussit enfin à obtenir sa disgrâce[1].

iv. Petite bourgeoisie

Entre la femme de la moyenne bourgeoisie et la femme du peuple se place celle de la petite bourgeoisie ; épouses des commerçants aisés, des artistes, des marchands, des petits propriétaires de province forment une classe dont la vie d’ailleurs est, suivant les milieux et les cas individuels, bien différents mais qui présente un caractère commun : celui d’être, bien moins encore que les bourgeoises de condition moyenne, touchée par l’esprit nouveau et d’avoir davantage conservé les mœurs antiques de gardiennes du foyer et de collaboratrices intimes du mari.

Une transformation s’est, il est vrai, accomplie dans sa vie matérielle.

Rien de plus modeste que la vie d’une petite bourgeoise au xviiie siècle : elle vit le plus souvent dans sa cuisine qui est en même

  1. Arch. Départ., Gers, C. 17.