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lés avec l’évêque de Rennes, l’un des opposants les plus notables à l’application de l’édit du vingtième et avec la noblesse bretonne, furent aigus[1].

En dehors même des femmes ou parentes des représentants du roi, quelques femmes de gentilshommes nous apparaissent comme s’intéressant à la politique et y prenant au besoin une part active.

Le salon de Mlle de la Roullière, à Lyon, fut un centre d’opposition assez vive contre la politique de Choiseul, puis contre celle du comte de Saint-Germain. Les lettres de Mlle de la Roullière sont un écho des griefs de la petite noblesse, contre les réformes militaires du comte de Saint-Germain qui, parfois par de brusques mises à la retraite, lésèrent les intérêts des gentilshommes de province, passant leur vie dans les fonctions militaires subalternes, au service du roi. Ce mécontentement va, chose assez significative, jusqu’à s’exprimer par de violentes attaques personnelles contre la Cour, contre la famille royale elle-même, dont on critique le luxe et le coûteux train de vie. C’est déjà l’état d’esprit dont fera preuve la petite noblesse au cours de la rédaction de ses cahiers aux États Généraux[2].

En Bretagne, la duchesse de Chaulnes ne fut pas la seule à s’intéresser à la question du vingtième ; un certain nombre de femmes se montrèrent, comme leurs maris, de passionnées adversaires du nouvel édit. C’est au témoignage de d’Argenson, chez une des principales dames de la ville de Rennes, que s’assemblèrent, en 1753, les conjurés contre l’édit de finances et l’impôt du vingtième[3]. Sa résistance aux volontés royales fut d’ailleurs payée de l’exil. Et d’Argenson considère cette rigueur, cependant justifiée, comme une vengeance de la duchesse de Chaulnes. En province comme à Paris, les intrigues personnelles des femmes s’enchevêtrent si bien avec la politique générale et les obligations du gouvernement, que les contemporains eux-mêmes arrivent à ne pas toujours pouvoir les distinguer.

Ce ne sont là que quelques exemples de l’activité politique déployée par les femmes de la noblesse provinciale. Il est évident toutefois que, si elles s’intéressent à la politique et savent y tenir un rôle le cas échéant, elles ont moins d’occasions d’exercer leur goût de l’intrigue ou leurs aptitudes diplomatiques que celles qui vivent à Versailles et que, sauf exceptions, la politique tient dans

  1. D’Argenson. Loc. cit.
  2. De Gallien. La vie de province sous l’ancien régime.
  3. D’Argenson. Loc. cit.