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loup. Les Choiseulistes font auprès d’elle mille démarches pressantes. Et ils s’imaginent que ces démarches vont être couronnées de succès. Les espoirs du parti de Choiseul sont partagés par l’Autriche.

Dès le lendemain de la mort de Louis XV, Mercy Argenteau demande à Marie-Thérèse d’écrire à sa fille qu’elle veuille bien l’écouter sur les grands objets pouvant intéresser l’union et le système des deux Cours[1].

De fait, la diplomatie impériale d’une part, le parti de Choiseul de l’autre, et, jusqu’en 1781, tous les ennemis des ministres en place ne cessèrent de mettre en la reine tous leurs espoirs. Longtemps ces espoirs furent déçus par l’insignifiance de son rôle politique.

Malgré tous les efforts tentés alors par son parti auprès de la reine, celle-ci ne parvint pas à obtenir de Louis XVI le rappel de Choiseul, qui fut évincé au profit de Maurepas. Elle n’eut aucune part dans la formation du nouveau ministère. Aucun des ministres ne fut même, comme l’espérait Mercy Argenteau, le représentant du parti autrichien[2]. Les deux premières années du nouveau règne, marquées par l’absence complète d’intimité entre les deux souverains, sont pour la reine des années d’abstention politique presque complète. En vain, l’ambassadeur d’Autriche à-t-il essayé d’amener Marie-Antoinette à revendiquer, lors du sacre, les prérogatives anciennes des reines tombées depuis longtemps en désuétude. Elle n’assiste à la cérémonie de Reims qu’en spectatrice. Non seulement elle n’exerce pas de rôle politique, mais son influence est à peu près nulle. Au cours de ses très fréquents démêlés avec Turgot, c’est presque toujours le contrôleur général qui l’emporte. Et sans doute la chute de Turgot est en partie l’ouvrage de la reine et, derrière le comte de Guiches, protégé de la reine, qui fut l’occasion du dernier et du plus violent conflit entre la reine et Turgot, tenait le parti de Choiseul.

Mais il est bien démontré que l’hostilité de la reine contribua | moins à la chute de Turgot que son humeur cassante et la coalition de tous les privilégiés. D’ailleurs, la reine ne profita guère de la chute du contrôleur général et elle n’eut aucune part dans le choix de Necker qui allait devenir l’homme le plus important malgré ses titres d’abord modestes.

La faiblesse de l’influence de la reine sur l’esprit du roi, on avait pu en avoir une idée au cours de la crise diplomatique qui agita

  1. De Pimodan. Mercy Argenteau.
  2. De Pimodan. Ibid. Marquis de Ségur. Au couchant de la monarchie.