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Allemagne, écarter l’éventualité de la guerre de terre et faire prédominer la guerre de mer, favorable aux intérêts et à la gloire de Machault, alors secrétaire d’État à la Marine.

Il y a évidemment contradiction entre ces deux attitudes prêtées en même temps à Mme  de Pompadour. Mais la contradiction n’est-elle pas plus apparente que réelle et ne pourrait-on pas avancer — c’est là encore une hypothèse et elle demanderait à être appuyée par des faits plus nombreux que les indications que nous essayons de coordonner, — que Mme  de Pompadour qui, il faut toujours y revenir, a partie liée avec les financiers, représenta un moment à la Cour un parti mercantile qui, tantôt par un accommodement à tout prix avec l’Angleterre (comme lors de la disgrâce de Machault), tantôt par la guerre avec cette puissance, poursuivit des avantages économiques, que Machault jusqu’à sa disgrâce la soutint dans cette politique, mais qu’après le départ de Machault, l’arrivée au pouvoir de Choiseul et l’impossibilité une fois démontrée (après Rosbach) d’avoir raison facilement du roi de Prusse, il sembla difficile de faire prédominer la guerre maritime et que celle-ci passa, contre le gré de Mme  de Pompadour au second plan. Il est sûr en tout cas que Mme  de Pompadour ne cessa, pendant toute la guerre, de suivre avec la plus vive attention les opérations de la guerre maritime, d’observer l’Angleterre et de prendre une part active aux négociations qui amenèrent la paix. Mais quelle est alors son attitude ? Celle d’une femme pressée de faire la paix à tout prix et à qui la perte des territoires et de l’honneur même importe peu ? Parcourons encore ses « lettres ». Nous la verrons, en 1761, s’enthousiasmer pour la générosité du « bon peuple de France » qui a répondu si généreusement à l’appel de Choiseul pour une souscription destinée à refaire la marine de guerre[1]. Nous la verrons pousser activement à la conclusion du pacte de famille[2], peser assez sérieusement le pour et le contre de la continuation de la guerre avec l’Angleterre dont, d’après ses informations, « la dette est énorme, la richesse n’existe que sur le papier et la banqueroute est imminente[3] », mais finalement poussant, sur l’ordre formel du roi, ministres et ambassadeurs à la paix[4].

Sans doute, ces sentiments et les mots que l’on prête à Mme  de

  1. Lettre à la comtesse de Baschi.
  2. Lettre au marquis de Beaufort.
  3. Lettre à la comtesse de Baschi.
  4. « Le roi veut la paix. » Lettre au duc de Nivernais, 1762 ; lettre à Choiseul, 1762.